Christian Gury
Proust et l’adoption
Non lieu, Paris,
2015, 341 pp.
ISBN:9782352702092
Dans l’ignorance, vraie ou feinte, des lois
de son époque, Marcel Proust suspectait des homosexuels de sa connaissance, le
romancier Abel Hermant ou le patron de presse Léon Bailby, d’être les étranges
pères de jolis «fils adoptifs». Il craignait aussi, par une mauvaise
interprétation du droit nobiliaire français, que le duc de Montmorency puisse,
en épousant Mme Blumenthal, adopter le fils de cette dernière et lui
transmettre son titre.
Et il était scandalisé que son ami Pierre
de Polignac ait accepté de se marier avec la fille naturelle et adoptive du
prince de Monaco. Dans son snobisme et son conservatisme, Proust se disait horrifié
qu’un roturier fût susceptible d’entrer par adoption dans une famille de
vieille aristocratie ou que «la solennité des sacrements d’une forme
juridique» vienne «parer» aux couleurs de «l’inceste»
une «banale aventure d’homosexualité».
Ainsi s’explique l’épidémie d’adoptions
aberrantes d’A la recherche du temps perdu, le plus souvent punies par leur
prolongement en mariages malheureux, les deux institutions du mariage et de
l’adoption étant conçues comme équivalentes ou fonctionnant en synergie de passerelles
sociales. Par exemple, faute d’adopter le Narrateur ou le jeune Morel de son
coeur, le baron de Charlus adoptera la nièce de Jupien, dans l’espoir de
s’introduire en tiers dans le couple qu’elle ira former avec un Léonor de
Combremer de moeurs suspectes.
Et M. de Forcheville adoptera Gilberte
Swann, bientôt l’épouse d’un marquis de Saint- Loup amateur de garçons.
Christian
Gury (1950-), est avocat honoraire à la Cour d’appel de Paris et essayiste.
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Del mismo autor
también
Christian Gury
Le mariage raté de Marcel Proust et ses conséquences
littéraires
Kimé, Paris, 2001, 442 pp.
ISBN: 9782841742608
Entre 1888 et 1892, Proust et Lyautey
fréquentent le salon des Baignères. Proust y est le témoin de la rupture entre
Louise Baignères et Hubert Lyautey, coureur de dot. En 1904, Proust, qu’on
complote de marier, effectue une croisière en compagnie d’Inès de Bourgoing, veuve
Fortoul. En 1907, également sur un bateau, Lyautey rencontre la même veuve,
qu’il épouse en 1909. La coïncidence déclenche la logorrhée de la Recherche,
palimpseste semé de calembours, féerie raillant sous mille travestissements les
amours d’Hubert, le thème du » Mariage de Lioté » dans la logique de
celui du Mariage de Loti.
Mme Forte-Houle inspire Mme de Cambre-mer,
la duchesse de Guermantes (Tangue-mer) ou Albertine Simonet (Inès Liot
bat-mer). Le maréchal Li-Haut-Té donne des traits à Legrandin (Le Grand Un),
Bréauté (Braies ôtées valant Lit ôté), Vaugoubert (Avait le goût d’Hubert), le
roi Théodose (Dose de ôté), etc. La famille Baignères se retrouve dans les
Swann (de : to swam, déclinaison de nager) ; et, du thé au lit de la tante
Léonie naît le lit au thé puisque Combray signifie : Maroc-bis.
Donnant une cohérence unificatrice à
l’ensemble de l’œuvre, la démonstration pulvérise tout ce que l’on a écrit
jusqu’à présent sur la genèse et l’architecture de la Recherche.
Marcel Proust por Andy Warhol (1974)